Sécheresse dans l'Hérault : entre longévité et sévérité exceptionnelles
La sécheresse continue d'affecter significativement le département de l'Hérault, par sa longévité et son intensité exceptionnelle. Le dernier Comité de Suivi de Ressources en Eau s'est tenu le 22 janvier 2024 à la préfecture de l'Hérault. Et les nouvelles ne sont pas bonnes : malgré les précipitations tombées en début du mois de janvier, sept bassins-versants demeurent encore en alerte renforcée. Le bassin de l'Orb aval est toujours placé en crise.
Carte : état de la sécheresse au 1er février 2024 dans l'Hérault (cliquez ici pour l'accès aux services de la Préfecture).
Plusieurs indicateurs démontrent la gravité de la sécheresse dans le bassin aval de l'Orb. Le premier est le déficit de précipitations qui grossit de jours en jours depuis presque deux ans. Sur la station météorologique de Béziers-Vias, on relève entre avril 2022 et février 2024 un cumul total de 541,3 mm. Elles représentent un peu moins d'une année civile dans les normales climatologiques 1991-2020 locales : on parle ici de sécheresse météorologique, initiée par la récurrence des remontées anticycloniques des Açores en toutes saisons.
Le deuxième est l'indice d'humidité des sols, une grandeur permettant de quantifier la réserve en humidité des sols par l'indicateur SWI. La règle est simple : si le SWI est proche de 1, le sol est humide, et inversement, si le SWI est proche de 0, le sol est sec. Actuellement, le SWI dans le Biterrois franchit la barrière négative, c'est-à-dire un niveau qualifiant les sols d'extrêmement secs. Par exemple, il se traduit chez-vous par la qualité de la terre, ressemblant à de la poussière et à l'état de stress hydrique des végétaux. On parle donc de sécheresse agricole, qui est couplée sur nos plaines littorales avec une salinisation des sols par les vents marins, salant les eaux douces nécessaires à la croissance végétative des vignes par exemple.
Le troisième est l'indice de hauteur des nappes phréatiques et des cours d'eau. Sous les plaines Biterroises et Agathoises se trouve la nappe Astienne, une nappe d'eau douce, qui permet de bénéficier des ressources en eau potable. Le niveau de cette nappe est actuellement très bas, d'où la mise en place d'une alerte renforcée par la Préfecture pour très largement réduire les extractions d'eau. Il en est de même pour les cours d'eau où l'axe soutenu de l'Orb est lui aussi placé en alerte renforcée, réglementant les procédures d'irrigation pour nos agriculteurs. On parle de sécheresse hydrologique.
Schéma : les types de sécheresse (www.aquagir.fr)
La principale problématique résulte que nous sommes concernés par les trois types de sécheresses en simultané. En l'absence de pluie, la sécheresse météorologique induit par effet d'engrenage une sécheresse agricole et hydrologique.
De plus, plusieurs facteurs aggravent cette situation : l'hiver est la période de l'année la plus propice au rechargement des nappes phréatiques. Or, l'hiver 2024 se caractérise par une dominante anticyclonique incontestable dans l'Hérault, ou alors un assèchement de la masse d'air par les vents de Nord/Nord-Ouest. Dernier paramètre : l'exceptionnelle douceur aggrave la sécheresse par la pousse précoce des essences végétatives et la rapidité d'assèchement des sols.
Seul point positif : la neige tombée en quantité courant mi-janvier dans les hauts cantons a permis de recharger les lacs de barrage. Aux Monts d'Orb, on estime au 1er février un volume d'eau de 22 millions de m3 disponibles (76% de la capacité totale de l'ouvrage), d'après BRL. Et heureusement que l'aqua domitia permet aussi de nous fournir de l'eau potable depuis les ressources karstiques du Lez. Mais jusqu'à quand ?
Carte : Accumulation des précipitations d'ici samedi matin (modèle Arpege, Meteociel)
Une fenêtre perturbée se confirme pour la fin de semaine. Elle débutera vendredi avec des pluies orographiques sur les Cévennes, poussées par un flux de Sud-Est assez dynamique, épargnant la plupart des plaines du département. De fait, les caractéristiques dominantes - pour l'heure - de cette dégradation, tant par sa durée que son intensité demeure être un mirage face à cette sécheresse chronique qui impacte nos régions.